Le journalisme dans la toile d’Internet

L’argent des médias

Diffuser un journal à grande échelle, de même qu’émettre dans la France entière des images et du son demande des moyens techniques et donc financiers considérables. Sans même compter la rémunération des journalistes, diffuser de l’information coûte cher.

Cette nécessité de moyens conduit à un effet pervers : en France, l’essentiel de la presse est partagé entre neuf principaux groupes1Les neufs principaux groupes de presse français :
⁃ Hachette Filipacchi (détenu par le groupe Lagardère), qui comprend des titres comme Paris-Match, Le journal du Dimanche, Elle, Photo, Public
⁃ La Socpresse (Dassault Communication), qui publie entre autres Le Figaro
⁃ Le groupe Amaury, auquel appartient Le Parisien
⁃ Mondadori Magazine France (détenu par Sylvio Berloscuni) : Téléstar, Modes et Travaux, Closer
⁃ Prisma Presse, dont dépendent VSD, Téléloisirs
⁃ Le groupe La Vie – Le Monde
⁃ Bayard Presse : Pèlerin magazine
⁃ Ouest-France
⁃ Sud-Ouest
(La concentration des médias sur Wikipédia)
. Robert Hersant, ancien patron du groupe éponyme, aujourd’hui scindé entre la Socpresse et le groupe Hersant Médias, ne s’en cachait pas : « C’est la même chose pour moi que n’importe quel chef d’entreprise : la finalité d’une entreprise au plan industriel, c’est son développement, et la stagnation c’est le commencement de la fin »2Cf. Patrick et Philippe Chastenet, Citizen Hersant : De Pétain à Mitterrand, histoire d’un empereur de la presse, Paris, Seuil, 1998, p. 398.

« Depuis le début, je ne fais pas un journal, je fais des journaux, et je continuerai à faire des journaux. C’est la même chose pour moi que n’importe quel chef d’entreprise : la finalité d’une entreprise au plan industriel, c’est son développement, et la stagnation c’est le commencement de la fin. » Robert Hersant, ancien patron du groupe Hersant

Une répartition des principaux titres sur aussi peu de groupes de presse, et surtout au sein de groupes financiers plus importants comprenant nombre d’autres types d’entreprises, engendre des questions éthiques importantes. Un journal n’est, de fait, plus libre de sa propre publication. On court au conflit d’intérêts. Comment un journaliste du Figaro pourrait-il rédiger un article mettant en cause le groupe Dassault ? On ne crache pas dans sa propre assiette. Ce n’est plus une question d’éthique, mais de bon sens.

Le rachat des titres de presse, dont l’objet premier devrait être d’informer, par des groupes financiers, dont l’objectif est de faire toujours plus d’argent, conduit à un évident glissement. Sophie Gauvin, chef de rubrique à Téléstar, confie en aparté : « Quand c’est un commercial qui fait la couverture de notre magazine, on ne s’étonne plus de rien ». Avant d’informer, on vend.

Dans tous les médias, la publicité représente aujourd’hui le financement le plus important, quand il n’est pas le seul. Peu de journaux, si petits soient-ils, peuvent survivre sans cet apport financier. Jusqu’à laisser la ligne éditoriale au service publicité : on ne peut pas risquer de perdre un annonceur important pour un article. Les questions éthiques pour un dirigeant de journal sont là aussi légions. Un rédacteur en chef de France Soir ne pourra pas publier la liste noire des compagnies aériennes sans s’interroger sur les revenus de son journal quand il sait que ses annonceurs, et certains des membres de son groupe sont ces mêmes compagnies.

[Suite : Les attentes du public]

2 thoughts on “Le journalisme dans la toile d’Internet

  1. C’est bien l’ennui avec la presse, elle ne s’affaire que pour sa survie et ne voit pas qu’ainsi elle agonise à petit feu.
    L’acceptation résignée ne mène à rien de vivant.

    Adieu la presse.

  2. La presse se porte très mal aujourd’hui financièrement. Et si elle tient à jouir de sa liberté d’expression, il faut impérativement de l’argent dans les caisses. Sans argent le choix n’est pas toujours possible. Maintenant on peut bien évidemment s’interroger sur certaines décisions prises par la presse pour survivre.

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